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de Londres, il convenait aux intérêts de leur nation de se mettre en travers de nos projets. L’amiral Boscawen avait déjà répondu à nos acquisitions de Villenour et de Bahour par une entente avec Mahamet Ali et par la prise de possession de St-Thomé. Lorsque Chanda S. et le roi de Tanjore nous eurent cédé les 81 aldées de Karikal, Floyer et son conseil, profitant de la levée du siège de Tanjore, avaient, le 10 mars, hissé leur drapeau sur les aldées de Trivendipouram, attenantes à celles de Goudelour, que nous considérions comme notre propriété et, malgré nos protestations, l’y avaient maintenu. Maintenant que par la participation personnelle de Nazer j. aux hostilités, la fortune des armes risquait de décider du sort du Carnatic, il parut à Floyer et à son conseil que, malgré l’infériorité de leurs forces — les Anglais n’avaient pas à ce moment plus de 800 hommes tant à Madras qu’à Goudelour et à Devicotta — il était de toute urgence de ne pas laisser la suprématie française s’affirmer. Comme la paix régnait en Europe entre les deux nations, ils ne pouvaient songer à se déclarer ouvertement contre nous, mais sans être « partie principale » dans le conflit, il leur sembla qu’ils pouvaient y entrer comme « auxiliaires », sans que la lettre des traités cessât d’être respectée. L’important, à leurs yeux, était que la guerre ne fut jamais portée directement en territoire français. En venant présentement au secours de Nazer j., c’était donc comme simples auxiliaires qu’ils intervenaient[1].

  1. Cette distinction entre auxiliaires et partie principale, moins subtile qu’elle ne peut le sembler au premier abord, donna lieu ultérieurement entre les Français et les Anglais à de multiples dissertations où ne régna pas toujours la bonne foi et où chacun des partis s’efforça de couvrir ses opérations d’une légalité certaine, en se réclamant l’un et l’autre de l’autorité des princes indiens dont il avait épousé la cause.