Page:Martin du Gard - Le Pénitencier.djvu/169

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Elle prononça « oui » en remuant ses lèvres rouges, sans proférer un son.

— « Tu vas te faire gronder ! »

Elle hésita et lui jeta un regard hardi, pour voir s’il plaisantait. Enfin elle déclara :

— « Mais non ! D’abord, ça n’est pas un péché. »

Antoine sourit ; c’était bien ainsi que Mademoiselle distinguait le bien et le mal. Il se demanda ce que valait pour l’enfant l’influence de la vieille demoiselle ; un coup d’œil sur Gise le rassura : c’était une plante saine qui se développerait n’importe où, échapperait à toutes les tutelles.

Gisèle ne quittait pas des yeux la porte entrebâillée.

— « Eh bien, entre », fit Antoine.

Elle étouffa un cri de joie et se glissa comme une souris dans l’intérieur.

Mademoiselle était seule. Grimpée sur le canapé-lit et se dressant sur ses pointes, elle achevait de suspendre au mur le christ qu’elle avait donné à Jacques pour sa première communion, et qui devait continuer à protéger le sommeil de son enfant. Elle était gaie, heureuse, jeune, et chantonnait en travaillant. Elle reconnut le pas d’Antoine