Page:Martin du Gard - Le Cahier gris.djvu/170

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

— « Allez la voir », ajouta-t-elle, remarquant que les mains de Jérôme tremblaient. « Mais ne l’éveillez pas. »

Quelques minutes s’écoulèrent. Mme  de Fontanin s’était assise. Jérôme revint sur la pointe des pieds et ferma soigneusement la porte. Son visage rayonnait de tendresse, mais l’angoisse était dissipée ; il riait de nouveau et clignait des yeux :

— « Si vous la voyiez dormir ! Elle a glissé de côté, la joue sur la main. » Ses doigts modelaient dans l’air la forme gracieuse de l’enfant assoupie. « Elle a maigri, mais c’est presque tant mieux, elle n’en est que plus jolie, ne trouvez-vous pas ? »

Elle ne répondit rien. Il la regardait, hésitant, puis il s’écria :

— « Mais, Thérèse, vous êtes devenue toute blanche ? »

Elle se leva et courut presque à la cheminée. C’était vrai : deux jours avaient suffi pour que ses cheveux, argentés déjà mais encore blonds, eussent tout à fait blanchi sur les tempes et autour du front. Daniel comprit enfin ce qui, depuis son arrivée, lui semblait différent, inexplicable. Mme  de Fontanin s’examinait, ne sachant que penser,