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mon être qui est tien, entièrement et avec volupté !

« Méfie-toi. QQ’ nous a fait un sale œil. Il ne peut pas comprendre qu’on ait de nobles pensées et qu’on les communique à son ami, pendant qu’il ânonne son Salluste !

« J. »


De Jacques encore, cette lettre écrite d’un jet, et presqu’illisible :


« Amicus amico !

« Mon cœur est trop plein, il déborde ! Je verse ce que je peux de ses flots écumants sur le papier :

« Né pour souffrir, aimer, espérer, j’espère, j’aime et je souffre ! Le récit de ma vie tient en deux lignes : ce qui me fait vivre c’est l’amour ; et je n’ai qu’un amour : TOI !

« Depuis mes jeunes années, j’avais besoin de vider ces bouillonnements de mon cœur dans le cœur de quelqu’un qui me comprenne en tout. Que de lettres ai-je écrites, jadis, à un personnage imaginaire qui me ressemblait comme un frère ! Hélas ! mon