Nous voici avec nos jambes de bois et nos béquilles, nous voici appuyés sur le tombeau de notre père Frédéric ; et des larmes jaillissant de nos yeux, ruissellent sur nos barbes blanches, — ruissellent sur nos barbes blanches.
Aussi nous qui jadis, au temps de Frédéric, touchions une si bonne solde, nous ne recevons phis aujourd’hui qu’un maigre pain, et notre vie est misérable, — et notre vie est misérable !
Nous voilà donc désormais abandonnés comme de pauvres orphelins, et nous nous regardons en pleurant, et nous n’avons plus qu’un désir, celui de te rejoindre bientôt pour ne plus jamais te quitter, — pour ne plus jamais te quitter !
Oui, père ! puissions-nous te racheter avec notre sang, oui, par Dieu ! nous, invalides, nous voudrions tous t’arracher, t’arracher des mains de la mort ! — nous voudrions tous t’arracher des mains de la mort !
Ces chansons, on le voit, n’omettent rien de ce qui intéresse le cœur du soldat, au foyer domestique aussi bien que sous la tente et dans les camps. La fiction, les banalités déclamatoires ne trouveraient pas là leur compte. Des sentiments vrais, des situations naturelles, tel est le thème que se plaît à développer cette muse populaire qui peut bien paraître quelquefois puérile, mais qui toujours nous attache et nous émeut. Ses puérilités sont même une grâce et un charme de plus, car elles sont naïves. Que peuvent désirer de mieux des esprits blasés qui se sont fatigués de tout, même de l’exagération en tout ? Qu’ils trempent leurs lèvres à ce limpide breuvage, il leur sera salutaire. Nous