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tail les diverses circonstances de cette vie politique de Kinkel, sur laquelle l’étonnant hasard de son évasion projette un certain intérêt romanesque, pourront consulter avec fruit les deux gros volumes publiés en 1850 par M. Strodsmann sous ce titre : Gottfried Kinke.

Nous préférons revenir à ses œuvres littéraires.

J’ai indiqué plus haut les conditions dans lesquelles s’est écoulée l’enfance solitaire et même un peu sauvage de notre poète. Cette fantaisie errante et indépendante au milieu des plus gracieux aspects de la vallée du Rhin, au pied de ces sept montagnes qui, jointes au fantôme lointain de la cathédrale de Cologne, donnent à tant de frais tableaux un encadrement d’une grandeur sévère, devait favoriser le développement de l’originalité dans le caractère de l’homme non moins que dans le talent de l’écrivain. Religieusement élevé dans ce principe que l’on doit tout immoler au devoir, tout subordonner à une conviction consciencieuse, Kinkel, que son tempérament poussait à l’action, montra, dès ses débuts dans les lettres, cette décision, cet entrain dramatique, cette marche fiévreuse vers le dénouement, qui signalèrent plus tard son irruption dans le grand-duché de Bade. La voix intérieure une fois entendue, il est de ceux qu’aucun Rubicon n’arrête ; et puisque ce mot est tombé de ma plume, je ne crois pas indifférent de rappeler que notre poète a chanté le grand César comme on chante le héros de son choix. Ailleurs, dans quelques strophes, remplies de la sérénité dont la maison paternelle (le presbytère protestant d’Obercassel) avait laissé en lui l’idéal et le souvenir, le besoin, la soif ardente de la vie active éclate tout à Coup, et voilà cette lame étincelante qui sort en frémissant