où il donne à ses fils une partie importante de ses États.
Le seigneur Ludwig, lorsqu’il était à Aix-la-Chapelle, passait volontiers de longues heures à table ; c’était un empereur pieux, et qui, en outre, aimait beaucoup les pommes.
Un jour qu’il s’y trouvait entouré de ses fils, il se dit : Essayons un peu leur obéissance.
Et il cria à l’aîné : — Approche et obéis-moi ; ouvre la bouche afin d’y recevoir ce morceau de pomme.
Pépin-le-Long répondit : — Seigneur père, à quoi bon cette plaisanterie ? je puis bien peler moi-même les pommes que je veux manger ; je suis, Dieu merci, assez grand pour cela !
Alors Ludwig, s’adressant à son second fils : — Puisqu’il en est ainsi, à toi maintenant d’ouvrir la bouche et d’avaler ce morceau que ma main y va jeter.
Et Ludwig s’agenouillant devant le siège paternel : — Comme vous l’ordonnez, mon père ! Et il prit le morceau de pomme.
Alors le pieux empereur dit : — Un royaume est à toi, le vaste pays des Francks ; voilà désormais ton héritage.
Puis, s’adressant à son troisième fils, qui répondait au nom de Lothaire : — Cet autre morceau de pomme, mon fils, reçois-le de ma main.
Et Lothaire s’étant aussitôt agenouillé devant le siège paternel : — Avec ce morceau de pomme, reprit l’empereur, tu as reçu la couronne impériale.
Ayant entendu ces paroles, Pépin ne voulut pas non plus perdre son temps ; spontanément, et de la meilleure volonté du monde, il s’agenouilla devant son père, ouvrant démesurément la bouche.
L’empereur dit : — Plus rien, tu arrives trop tard, il ne reste plus rien pour toi ; ma pomme entière est partagée.