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s’y mêlent, et il se dégage du tout je ne sais quel arôme sauvage qui agace et qui charme. Je tâcherai plus tard d’en rendre l’idée sensible par quelques exemples. Je voudrais montrer comment les modernes rhapsodes ont brodé sur le canevas purement épique. Commençons par une scène empruntée aux premiers temps de l’introduction du christianisme parmi les peuplades germaniques. Elle dépeint assez énergiquement la résistance opposée par les anciennes croyances aux nouveaux convertisseurs :


Radbod, le prince des frisons

Radbod, le farouche roi des Frisons, se tenait là debout au bord du fleuve, prêt à recevoir le baptême. Autour de lui, les prêtres rayonnaient déjà d’une conversion qui, après tant d’oscillations, allait enfin leur faire récolter les fruits de leurs longs efforts.

Déjà son pied touchait la surface de l’eau, lorsque s’arrêtant tout à coup :

Encore un dernier point à éclaircir, seigneur évêque ! Mes pères, tous mes ancêtres, — parle sans crainte, — après leur mort, où sont-ils allés ?

Dans l’enfer, répond le pieux évêque ; tes pères, qui moururent tous païens, tes pères sont allés dans l’enfer.

Ces paroles font jaillir des flammes des yeux du farouche guerrier.

Maudit prêtre, s’écria-t-il alors, mes pères furent des vaillants et des braves ! J’aime mieux, j’en atteste Odin, j’aime mieux mille fois me trouver avec les héros dans l’enfer qu’avec votre méchante prêtraille dans le ciel.

Il dit, et s’éloigne d’un air fier et dédaigneux.


À côté du héros encore barbare, se présente le héros