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Ces pensées ne manquent assurément ni de grâce, ni de profondeur, ni surtout d’émotion pieuse, condition essentielle du genre. M. Spitta me semble avoir dans l’âme quelque peu de l’effusion religieuse de Lamartine au beau temps des Harmonies. Le symbole éclôt naturellement sous sa main, et cette faculté précieuse de tout animer, familière à l’âme allemande, serait peut-être ailleurs une pente dangereuse vers le panthéisme. La vie du Christ a fourni maintes fois à l’esprit symboliseur de M. Spitta des images en harmonie avec la grandeur touchante d’un pareil sujet. Elle a inspiré les vers suivants qu’on me pardonnera dès lors de citer comme s’ils avaient M. Spitta pour auteur : qui sait si M. Spitta ne voudra pas les traduire ?


la colombe

Un jour, l’enfant Jésus, au radieux visage,
Avec d’autres enfants jouait sous le feuillage :
Ils dressent une digue au milieu du ruisseau ;
Ou bien c’est une écorce, en guise de vaisseau,
Qu’ils déposent sur l’onde, — et le frêle navire
Sous un trop lourd fardeau d’herbe et de fleurs chavire,
Jésus, d’un peu d’argile enlevée au chemin,
Façonne une colombe inerte dans sa main.
Il souffle sur l’oiseau qui s’anime et s’envole. —
— Et sur le front divin resplendit l’auréole.


le manteau

Une autre fois Jésus, au courant du ruisseau,
Dans un vase d’argile allait puiser de l’eau.
Sur le bord, où chacun se presse et veut sa place,
Il se heurte en passant, et sa cruche se casse.