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tiques (l’Empereur Henri IV, l’Empereur Frédéric Barberousse, etc.) certaines excentricités qui auraient empêché leur réussite au théâtre. Les ballades et romances de Rogge sont ses œuvres les plus achevées, les joyaux les plus purs de son écrin. Sous ce rapport, il s’est acquis une renommée solide, parfois même au niveau des maîtres du genre, Gustave Schwab et Uhland. C’est, avant tout, une tête épique ; il sait broder avec beaucoup de charme et de naïveté sur le tissu merveilleux de la tradition. Au nombre de ses ballades où l’élément légendaire a été le plus habilement exploité, il faut citer celle intitulée l’Empereur disparu, qui met en scène Frédéric Barberousse, et celle ayant pour titre l’Empereur par delà les mers, où apparaît la grande figure de Napoléon à Sainte-Hélène. Je traduis la première :


l’empereur disparu

Le vendredi saint était passé, la fête de Pâques était proche ; et cependant l’empereur d’Allemagne se tenait là plongé dans de sombres réflexions.

Le pontife de Rome, en lançant sur son front l’anathème, lui avait enlevé perfidement l’amour du peuple.

Ce qui rendait l’empereur si sombre, c’était de penser que son peuple égaré allait ainsi frapper au cœur l’arbre de sa propre gloire.

Et lorsque de toutes les tours les cloches firent éclater leurs voix, l’empereur, grave et calme, promena ses regards au loin alentour.

En longues files, la foule pieuse descendait de toutes les hauteurs, se dirigeant vers le sanctuaire où l’évêque allait célébrer la grand’messe.