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puissent ébranler parfois son imagination positive, ce n’est certainement pas le son des cloches. M. Dreves est né à Hambourg en 1846 ; il a fait plus que d’y naître, il y a vécu, et il est devenu un poète. La Muse l’avait donc bien fortement trempé dans ses ondes magiques ! Malgré les enchantements de la nature environnante, Genève, la mercantile et raisonneuse Genève, n’est guère propice à l’inspiration poétique ; à plus forte raison, Hambourg, qui est une Genève sans lac et sans montagnes. Il faut donc savoir gré, à M. Dreves de sa persévérance et applaudir doublement à ses succès. Sans avoir une individualité bien nettement accusée, ses chants, qui, malgré son généreux effort, subissent fatalement l’influence monotone des sables environnants, sont souvent empreints d’une distinction réelle, et l’on regrette alors que ce talent ne se soit pas développé dans un autre milieu. Tel qu’il est, d’ailleurs, hâtons-nous de l’ajouter, la ville libre de Hambourg, si elle soupçonne son existence, peut le citer avec quelque orgueil. M. Lebrecht Dreves a mis assez heureusement en action les Trois Âges d’Horace. Je place dans ma galerie ce joli cadre :


trois amis

À travers les riantes campagnes erraient un jour trois amis, un jeune homme, un vieillard et un homme mûr.

Les cimes des montagnes resplendissaient dans les rayons dorés du soir ; mais toute cette splendeur ne touchait pas le vieillard.

Des profondeurs ténébreuses du bois jaillissaient les trilles du rossignol ; mais le jeune homme restait sourd aux merveilleux accords.