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comprendre, j’indique ici que son lieu de naissance est Mirow, dans le Mecklembourg-Strelitz :


tiré du livre de famille

Dans la maison paternelle j’étais heureux, oh ! bien heureux ! Quand j’y songe, mon front devient sérieux et mon œil se mouille. J’avais trois frères, tous trois laborieux, actifs, pleins de franchise et de loyauté. J’avais cinq sœurs, toutes également bonnes, indulgentes, modestes. Mon père… je crois voir encore sa tête inspirée de prophète. Ma mère aveugle était douce comme un rayon des étoiles. Et mon duc, mon duc… en vain mes yeux cherchaient son pareil sur toute la terre allemande. Maintenant j’ai vieilli, je suis devenu un homme ; je m’assieds à mon propre foyer, et le contentement y habite ; mais, hélas ! je ne possède plus mon noble duc : semblable à ces tiges généreuses dont les larges feuilles ont longtemps prodigué leur ombre rafraîchissante, sa vénérable tête, riche de bénédictions, s’inclinant par degrés, dut enfin tomber sur le sol… Et que veulent dire ces monticules couverts d’une odorante et fraîche verdure ? Ah ! c’est que les anges ont emporté dans leurs bras père et mère ! c’est que frères et sœurs, tous ces chers et regrettés rameaux du même tronc, ont tour à tour pris le même chemin ! c’est que pas un seul ne m’est resté et qu’ils sont là tous ! Sans un cœur du même sang pour s’appuyer, où s’épancher, c’est pourtant être par trop seul, par trop misérable !… Mais, consolatrices fidèles, mes chansons sont encore là, et Mirow, ma patrie bien-aimée, est encore sous mes yeux.


M. Lebrecht Dreves appartient à une génération plus jeune, et la ville qui fut son berceau devait moins le prédisposer à la rêverie mélancolique : Hambourg n’a pas le temps d’être sentimental ; s’il est des sons qui