Page:Martin - Poètes contemporains en Allemagne.djvu/271

Cette page a été validée par deux contributeurs.
— 263 —

Les deux gouttes de pluie

Deux gouttes de pluie, un lourd soir de juillet.
Frappaient aux carreaux d’un chaume sans volet,
Et l’une disait à sa sœur l’autre goutte :
— Pourquoi nous frappons, tu le sais bien sans doute ?
— C’est pour dire à ceux que torture la faim :
Les seigles sont mûrs, voici venir le pain !


Et cette autre fantaisie, cette mélancolique boutade de la vie des camps, n’a-t-elle pas aussi un caractère à part ?


Au bivouac

Bivouac et clair de lune ! Aventuriers des deux mondes sont là pêle-mêle étendus dans le bois et sous la tente. Un seul, un seul se tient à l’écart. — Amis éloignés, pensez à lui.

Bivouac et clair de lune ! Au loin retentit le cri des sentinelles ; plus près éclatent rires et chansons. Un seul, un seul ne se mêle pas à ces bruits joyeux. — Amis éloignés, pensez à lui.

Bivouac et clair de lune ! Et le brasier s’assoupit lentement, et les hommes aussi s’endorment successivement alentour. Un seul, un seul ne s’endort pas. — Amis éloignés, pensez à lui.


J’arrive au cœur du livre, je pourrais aussi bien dire au cœur du poète ; j’arrive à l’épopée de l’exil, à la série de poëmes qui se déroule de la page 215 à la page 245. C’est la plainte du proscrit, et c’en est aussi l’odyssée. Retour furtif et périlleux dans la patrie, pieuses remembrances du passé, ineffable douceur du seuil domestique qu’on peut enfin revoir après tant de jours