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trois symphonies où il essaye les notes qui retentiront tour à tour, avec plus de sonorité et d’ampleur, dans le concert qui doit suivre. Ces symphonies ouvrent de larges ailes ; on sent que le souffle de l’inspiration est là, que le poète est entraîné par les flots harmonieux, et on se berce avec lui dans la douce mélopée de ses vers. En général les pensées et les sentiments exprimés par cette savante, par cette débordante musique, sont d’une élévation soutenue ; mais la seconde symphonie, consacrée à la glorification de la douceur pudique, de la candeur, symbolisées par la violette, contient quelques passages où l’auteur, peut-être pour montrer la portée de son instrument, me paraît avoir dépassé les limites naturelles de son sujet. Il n’est pas nécessaire, en effet, pour célébrer le charme ingénu de la violette, de s’écrier d’un ton un peu déclamatoire : « Ô toi que chanta le fils de la déesse, le fils au loin rayonnant, et la gloire immortelle d’Ilion, et ce malheureux roi errant de mers en mers, maître, demi-dieu, dieu, Homère enfin, ce n’est pas toi que j’admire ! mais j’aime le cher inconnu qui trouva la première violette, etc. » Il y a certainement là une fausse note.

J’ouvre le cycle intime du poète, et j’y trouve des pages gracieuses, souvent empreintes d’une tristesse qui n’est pas sans charme. Par exemple :


convalescence

Le soleil arrive enfin, et déjà s’assoupissent mes souffrances. Mais non, c’est une femme à la chevelure dorée ; elle pose sa main sur mon cœur, et sentant mon pouls s’engourdir, elle me tend un breuvage dans sa coupe d’or.