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ces vénérables pierres que la main puissante d’un maître a dressées jusqu’au sein des nues !

Jadis brutes et sans honneur, elles gisaient enfouies là-bas dans les entrailles de la vallée, ces mêmes roches qui maintenant se balancent si gracieusement dans les airs.

Avec quel art s’arrondissent les arches ! avec quelle légèreté s’élancent les sveltes tourelles, sous leur riante et solide ceinture de feuilles ! Ô mon clocher, que tu es beau !

Connaissez-vous le maître hardi qui a conçu ce chef-d’œuvre ? Il se nommait Erwin de Steinbach ; c’est lui, c’est Erwin qui l’a achevé.

C’est au pied de cette colline qu’il vint obscurément au monde ; accueilli par l’hospitalité allemande, il bâtit dans le ciel cette tente de pierre.

Et des siècles déjà se sont écoulés depuis que la haute merveille, objet de l’admiration et de l’étonnement des générations successives, les regarde passer à ses pieds, avec l’inaltérable sérénité de la grandeur et de la force.

Elle envoie un sourire ami aux charmantes campagnes de Baden, un sourire à la sombre couronne de la forêt Noire, un sourire aussi aux prés fleuris de l’Alsace, à toute la verte et profonde vallée du Rhin.

Pourquoi faut-il que des frontières séparent ce peuple loyal, ce noble pays ? — En vérité, ce serait un spectacle à rendre le monde jaloux, que de le voir fermement réuni par un seul lien.

Ah ! qu’un jour rattache encore à la même souche ce peuple et cette vallée, et l’on verra des flammes de joie resplendir sur le glorieux monument d’Erwin !


Né en 1803, Daniel Hirtz est aujourd’hui dans la pleine maturité de son talent. Retiré des affaires depuis 1858, il peut désormais disposer entièrement de ses loisirs et l’on est autorisé à penser qu’il les emploie à grossir sa gerbe poétique. S’il nous était permis de lui donner un conseil, nous lui dirions :