Page:Martin - Poètes contemporains en Allemagne.djvu/231

Cette page a été validée par deux contributeurs.
— 223 —

retour à l’obscurantisme. Cette lâche doctrine lui paraîtrait aussi blessante pour la dignité humaine que pour la foi. Si vous avez parcouru la ville de Strasbourg, vous aurez certainement remarqué ce chevalier tout bardé de fer qui, depuis des siècles, sert d’enseigne à une sombre maison située derrière la grande place. Cette enseigne a inspiré au poète deux strophes qui peuvent être considérées comme sa profession de foi :


l’homme de fer

Dans cette antique ville de Strasbourg se dresse un homme de fer. S’il était moins rouillé, digne de tout honneur il serait, ma foi ! Tenant sa longue lance et son bouclier d’airain, à ses pieds il regarde passer la vie du monde, et ne s’y reconnaît pas.

Sus ! pousse un bon coup de ta lance, quand cela menace de devenir par trop fort ! Mais aussi bien, vieux Croquemitaine, il faut nous passer quelque chose. Car différemment dans le ciel la lune se place ; en sens divers soufflent les vents, et le monde entier obéit à la loi du changement. — Que veux-tu y faire ?


L’allégorie est ingénieuse, et il y a encore au-delà du Rhin plus d’un chevalier en chair et en os qui la trouvera impertinente. — « Que peux-tu y faire ? répondra M. Karl Candidus, il faut bien nous passer quelque chose. » — Si cependant on n’entend pas raison, si on le pousse un peu trop, si les descendants du héros de fer menacent de revêtir leur vieille cuirasse et de dégaîner leur épée rouillée contre l’esprit moderne, ce nouveau dragon, alors le poète, sans se laisser intimider, s’armera lui-même d’une pointe sar-