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son tour, durant des siècles, dominant pignons et créneaux, la croix resplendit et régna.

Jusqu’au jour, encore proche, où, jouet puissant du destin moqueur, un nouveau César, imprimant une autre impulsion au monde, planta sa bannière tricolore près du beau colosse de Phidias.

C’était un fils de la Liberté ; mais oubliant cette noble origine, il se livra en holocauste à une nation dont l’inconstance n’en fit un Dieu aujourd’hui que pour l’abandonner lâchement demain.

Ah ! si ta voix tonnante, qui réveillait tant d’échos, avait accordé à l’Europe ce qu’elle demande en vain depuis si longtemps, tu serais à jamais devenu pour elle un autre Harmodius, un autre Aristogiton !

Maintenant ton nom est injurié, proscrit ; seulement, lorsqu’un navire vient à doubler ton tombeau, les matelots fatigués entonnent en chœur des chants inspirés par ton destin.

Et Rome ? elle est retombée dans ses anciennes ténèbres ; elle se tait, et près du caresse à six chevaux où se prélassent insolemment les maîtres, rampe silencieusement l’indicible misère des sujets.

Ce n’est plus le glaive ni la charrue que manient désormais les Romains ; à peine si leur main engourdie conserve assez de vigueur pour émonder les pampres suaves qui plongent leurs racines dans les décombres de l’antique grandeur.

Si Rome se montre encore quelque part, c’est dans la flamme du regard, dans la noble conception du Beau, ou bien encore dans la liberté menteuse du carrefour ; — mais elle a suivi l’appel de la volupté.


La tour de Néron

Tradition fort vraisemblable et que répète encore aujourd’hui le peuple : — C’est sur cette tour, quand il eut ordonné de mettre le feu à la ville, c’est sur cette tour que, les yeux