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déserte, avec son hôtel de ville en ruines, où le lion ailé de pierre se dresse encore comme au temps où saint Marc régnait sur ces lagunes. Toutes ces choses, mon bien-aimé me les conte, comme son père les lui avait contées. Au retour, il accompagne le bruit de ses rames de quelque chanson du pays ; c’est tantôt : Bienheureuse Rosette, et tantôt : Dans la gondole la Blonde. Ainsi s’écoule le jour de fête, n’apportant que joie et doux souvenirs.

Tricotez assidûment vos filets, chères sœurs ; mon fiancé en aura besoin aujourd’hui même, dès que sa barque ailée l’aura déposé sur la rive natale.


À Auguste Kopisch

Toujours, mais toujours en vain, parmi ce peuple étranger, et pourtant si sensible, j’ai cherché une âme aimante et douce comme la tienne, un accent enchanteur comme le tien. Naguère, d’un œil presque indifférent, je regardais ce paradis où s’élève ton sombre portique, ô Pausilippe ! Oui, d’un œil presque indifférent, je pouvais voir le disque de la lune plonger dans l’onde scintillante du golfe.

Le jour, j’errais solitaire à travers le tourbillon vivant de la ville ; — à peine plus solitaire encore, la nuit, quand je descendais silencieux au rivage désert. Les étoiles, la mer, le Vésuve lui-même, tout me semblait muet et sans vie.

J’allais ainsi morne et le cœur vide, lorsque des étoiles cent fois bénies t’amenèrent du tombeau d’Eschyle au tombeau de Virgile toujours rayonnant !

Plus qu’à tout autre, ami, ton arrivée me fut douce et bienfaisante : depuis longtemps aucun regard humain n’avait aussi profondément remué mon cœur, aucune voix aussi mélodieusement réjoui mon oreille.

Je crois entendre encore ta bouche me décrire la caverne béante du Cyclope, Palerme et ses bois d’orangers étoiles de fruits d’or, les plaines fécondes d’Agrigente, et les magnificences de l’art dorien étalant ses ruines.