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Depuis 1832, il dirigeait avec Gustave Schwab l’Almanach allemand des Muses, et traduisait avec F. de Gaudy les chansons de notre Béranger. » Voici enfin la traduction du poëme.


SALAS Y GOMEZ

I

Salas y Gomez se dresse au sein des flots du tranquille Océan ; rocher solitaire et nu, calciné par les rayons verticaux du soleil ; piédestal de pierre, dépourvu d’herbe et de mousse, où viennent s’abattre par bandes les oiseaux fatigués de planer au-dessus de ces plaines éternellement mobiles. C’est ainsi que Salas y Gomez apparut à nos yeux, quand de la hune du Rurick retentit soudain jusqu’à nos oreilles ce cri : Terre à l’ouest ! terre ! Arrivés à portée de vue, nous distinguâmes les troupes d’oiseaux marins, ainsi que les blanches couvées bordant le rivage. Depuis longtemps privés de toute nourriture fraîche, nous résolûmes aussitôt de nous y diriger en deux embarcations. On les met à flot, nous y descendons, et bientôt nous voilà côtoyant les brisants. Nous abordons à un endroit protégé contre le vent par les rochers ; notre troupe alors se divise en deux parties, dont l’une suit la rive à droite, et l’autre à gauche, tandis que moi-même je me mets à gravir le roc. C’est à peine si mes pas faisaient s’écarter les oiseaux, à qui mon approche ne semblait causer aucune crainte, et qui, seulement, dressaient la tête d’un air étonné.

Parvenu au sommet, je sentis mes pieds brûlants sur la chaude ardoise qu’ils foulaient, et je plongeai mes regards au loin, vers l’horizon circulaire. Quand ils eurent ainsi mesuré l’immensité déserte, mes yeux se reportèrent enfin autour de moi, et ce qu’ils aperçurent alors leur eut bientôt fait oublier le reste.