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noces est célébrée, dix-sept jours durant, avec une pompe difficile à décrire. Et Chriemhilt ? Chriemhilt, au milieu de toute cette magnificence, de tous ces honneurs, de toutes ces manifestations de joie dont elle est l’objet, « Chriemhilt ne pense qu’à ces beaux jours d’autrefois où elle vivait aux bords du Rhin avec son noble époux. Ses yeux sont voilés de larmes ; mais elle doit faire effort sur elle-même, afin de ne pas laisser voir sa tristesse. » C’est ainsi qu’est célébré son mariage, et que, cachant sa blessure toujours saignante, elle s’embarque sur le Danube et descend le cours du fleuve jusqu’à Etzelburg, sa nouvelle patrie.

Mais cette terre étrangère ne pouvait jamais être une patrie pour son cœur. Elle partage pendant sept années avec Etzel le trône du pays des Huns, et c’est alors seulement qu’elle devient mère d’un fils qui est baptisé sous le nom d’Ortlieb ; puis s’écoulent encore six autres années. Il s’en était donc passé vingt-six depuis le jour où Sigfrid avait été frappé dans l’Odenwald, au bord de la source. Le moment de la vengeance est venu.

« De longues et nombreuses années se sont écoulées, dit-elle un jour à Etzel, depuis que j’ai mis le pied sur cette terre étrangère, et jamais, depuis lors, je n’ai revu un seul de mes nobles alliés ; il m’est impossible de supporter plus long-temps l’absence de mes parents, car on dit déjà autour de nous, voyant que nul des miens ne me visite, que je suis une fugitive et une proscrite, sans famille ni patrie. » Etzel consent à faire naître pour Chriemhilt l’occasion de revoir ses frères, ses alliés et ses vassaux. En conséquence, elle le prie de les inviter à une fête. Le roi dépêche sans retard vers Worms les héros-bardes attachés à sa cour.