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histoire des églises et chapelles de lyon

bénédictin d’Ambronay, qui avait, aux Cordeliers, prononcé l’oraison funèbre de Mirabeau, intervint alors, et par je ne sais quel subterfuge, il empêcha que Saint-Bonaventure, érigé en succursale, avec des limites, décrites dans l’Almanach de 1792, eut un régime autonome ; il s’en déclara l’administrateur et préposa au service spirituel un certain Tenard, parfaitement inconnu d’ailleurs. Il eut même l’habileté, le 13 octobre, de se rendre, accompagné d’un de ses vicaires, M. Astier, au dépôt des Pas-Perdus et, sous les yeux d’un commis de la municipalité, M. Marguery, muni de la permission de M. Pierre Vial, membre du distinct, d’enlever huit chasubles, non médiocres, provenant des Chartreux, de la Platière, des ci-devant Dominicains, des aubes, des cordons et du linge pour le service, affirmait-il, de l’église succursale de sa paroisse. Je n’oserais soutenir qu’après le siège, au lendemain de l’ignoble procession de l’âne et de l’apothéose de Chalier, Saint-Bonaventure subit, comme la chapelle des Confalons, un pillage en règle et les souillures d’une émeute démagogique ; un historien l’a raconté, mais à l’appui de ces pages, inspirées par une brillante et jeune imagination, un document positif nous convaincrait davantage. Il semble même, d’après un ordre, envoyé le 23 nivôse an V (12 janvier 1797), conservé à l’Hôtel de ville, que le déménagement des marbres, des boiseries, des tableaux s’exécutât, sous la surveillance d’inspecteurs, qui ne signalèrent aucun détournement, ou bien aucune dévastation antérieure. Les quatre-vingt-dix stalles furent entreposées, dans le chœur de Saint-Jean, et nous savons que, plus tard, ses fabriciens formulèrent le vœu de les conserver pour la Primtatiale, avant que celles de l’abbaye de Cluny ne leur fussent octroyées.

Avant de vider le sanctuaire, il avait été procédé à l’adjudication, comme bien national, de ce que les litres nomment la masse claustrale des ci-devant Cordeliers. Dès le 24 et 25 floréal, an IV (13 et 14 mai 1796), le citoyen Joseph Villette, habitant place du Concert, s’était présenté comme soumissionnaire : le 12 prairial (31 mai), le receveur du domaine avait collationné les baux et estimé les parties de la propriété, qui n’avaient pas été affermées. La vente se traitait, conformément à la loi du 28 ventôse an IV, devant les délégués du département ; elle comprenait quatre lots : la maison sur le quai de Retz, n° 46, aujourd’hui, quai de l’Hôpital, une partie de terrain, de masures, et de hangars, contournant le chevet de l’église ; une maison à l’ouest, une autre à l’angle nord-ouest, de trois étages, louée au citoyen Jean-Baptiste Brun, qui l’acheta, le 6 vendémiaire an V, la revendit le 22 mai 1817 à Étienne Rhenter, commissaire priseur, auquel la ville la reprit, en 1826, pour le presbytère. Le prix global fut de 208.385 livres. Il est utile de rappeler que la voirie réservait, dans l’acte, le tracé de deux rues projetées, se coupant à angle droit, l’une tendant du Rhône au chevet de l’église, l’autre de la place du Méridien où elle s’engageait, sous une voûte, pour aboutir, à la rue Port-Charlet, à présent rue Ferrandière.

Il serait fort hasardeux, sans risquer d’en omettre quelques-unes, de rappeler les métamorphoses que subit, après sa désaffectation et son dépouillement complet, l’antique monument des Grôlée et des Pavie, où tant d’âmes avaient été consolées et purifiées, où un pauvre frère mineur avait chassé sept démons du corps d’une possédée. On y installa la halle aux blés, comme plus vaste et plus commode que la Grenette ; mais on chercha à en tirer tout