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d’être digne de son nom. Elle vivait à peine en mai 1790, et est nommée une dernière fois dans l’acte de vente du couvent des Grands-Carmes, le 7 juin 1793.

Avant de terminer, défendons sa mémoire d’un reproche ridicule que les historiens fantaisistes lui ont adressé ainsi qu’à d’autres confréries de l’ancien régime : celui d’avoir vendu des cervelles d’exécutés à des médecins ou à des empiriques accusés de magie et de sorcellerie, qui en faisaient des remèdes propres à guérir les épileptiques, les lunatiques, les gigoteux de la danse de Saint-Guy, en les leur appliquant, et même en les leur donnant à manger. Il est à peine besoin de réfuter une pareille fable à l’égard d’une association aussi respectueuse de l’âme et du corps que l’était celle-ci. Les pénitents de la Miséricorde ne vendaient ni cervelle, ni crâne, ni aucun membre des prisonniers exécutés, par la simple raison qu’ils n’en possédaient rien. Le corps du supplicié ne pouvait être abandonné ou prêté aux chirurgiens que par les autorités criminelles, sur l’avis des confrères que l’homme de l’art méritait confiance, qu’il n’était suspect d’aucune velléité de profanation et qu’il ne cédait dans sa demande qu’au désir de disséquer, de découper, comme on disait alors, pour se perfectionner dans son art. De même, quand la charitable compagnie avait été invitée par la justice à relever les cadavres des soldats exécutés, ces cadavres restaient sous sa sauvegarde. On possède quelques-uns de ces billets d’invitation, et, de 1676 à 1692, plusieurs demandes de livraison de corps à étudier, adressées soit au contrôleur général de la sénéchaussée, soit au lieutenant-criminel : elles sont signées J.-B. Gaultier, aspirant à la maistrance de chirurgie, Jean-Aimé Monderot, Simon-Pierre Chastagner, Michel Sales, Honoré Cadout, J.-B. Lermittème, maîtres chirurgiens jurés, Pierre Briant, lieutenant du premier chirurgien du roi à Lyon. La demande d’Honoré Cadout nomme le supplicié Fleuri Allier, un bandit célèbre du temps et que l’habile opérateur souhaite d’étudier ; celle de Pierre Briant, du 12 janvier 1692, convoite un cadavre non moins fameux, celui de Latour, le rival de Cartouche.

SŒURS SAINT-JOSEPH DE CLUNY

Parmi les communautés françaises épanouies au début du xixe siècle et qui prirent promptement une réelle extension, il faut mentionner la congrégation Saint-Joseph de Cluny qui possède aujourd’hui des établissements dans le monde entier. Elle dut son origine à une personne douée de qualités extraordinaires et dont il importe de rappeler, en quelques lignes, l’intéressante biographie.

Anne-Marie Javouhey naquit, le 10 novembre 1779, d’une famille de riches laboureurs. Nanette, comme on l’appelait, était la cinquième des dix enfants de la famille, mais, par l’influence, elle fut bientôt comme l’aînée. Elle apprit à lire, à écrire, un peu à calculer dans l’école de Chamblanc (Côte-d’Or) et en 1789, elle fit sa première communion. Quand la Révolution ferma les églises et condamna les prêtres à la déportation et à la mort, Anne-Marie