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XXIV
HISTOIRE DES ÉGLISES ET CHAPELLES DE LYON

à peu près fermées à personne de bonne volonté et d’audacieux dévouement. Quatre-vingts ans de trêve religieuse, même intermittente, permirent ainsi à plus de quatre-vingts colonies religieuses, hommes et femmes, d’acquérir leurs droits de cité. On vit Jésuites, Capucins, Dominicains, Carmes-Déchaussés, Lazaristes reprendre la prédication et la direction des consciences ; les Pères Maristes et les Oblats, partager leurs fatigues ; les missionnaires diocésains, ne le céder à aucuns de ces ouvriers apostoliques. Les Frères de la Doctrine chrétienne, les Petits Frères de Marie, les Frères de Saint-Viateur, les Frères du Sacré-Cœur se consacrèrent aux enfants des écoles ; les Frères de Saint-Jean-de-Dieu, aux malheureux fous ; les prêtres de Saint-Camille, aux infirmes, les compagnons du Père Planque aux nègres de l’Afrique. Comment énumérer ensuite les créations féminines ? tout ce qui sortit de ces milliers de cœurs vierges et héroïques, ce qu’ils conçurent, ce qu’ils rêvèrent, ce qu’ils réalisèrent ? Depuis les silencieuses Trappistines de Vaise jusqu’aux sœurs infirmières de nos hôpitaux, des Petites Sœurs des Pauvres et des Petites Sœurs garde-malades de l’Assomption aux maîtresses des pensionnats du Sacré-Cœur, quelle diversité de services, quelle opportune variété, dans une abnégation qui se sacrifie sans cesse aux désirs et aux maux du prochain. Mais, dans cette floraison, où la sève rajeunie combine les parfums d’autrefois aux couleurs éclatantes du jour, je réclame une place d’honneur pour trois noms dignes d’échapper longtemps à l’ingratitude et à l’indifférence. Mme Garnier, le Père Chevrier, l’abbé Camille Rambaud, en établissant le Calvaire, le Prado et la Cité de l’Enfant Jésus, ont déployé ce que la pitié humaine a de plus tendre et l’amour chrétien de plus délicat.

Contrairement au préjugé, qui dénonce l’encombrement de nos œuvres comme fatal à la richesse publique et qu’on a si habilement exploité, nos concitoyens ne se repentirent pas du geste qui livrait le terrain nécessaire à la culture des âmes et au soulagement des misères physiques. Leur ambition de prolonger leurs boulevards et leurs rues ne se heurta pas à d’invincibles forteresses ; leurs héritages n’allèrent point se perdre dans une improductive main-morte ; les plus réfléchis constatèrent au contraire une marche parallèle ascendante des instituts catholiques et de l’agrandissement de leur périmètre et de leurs affaires. La ville quadrupla de superficie, et, à mesure que des quartiers neufs, élégants ou populeux, se formèrent, naturellement s’accrut aussi le champ du clergé et de ses auxiliaires. Sous le Consulat, quinze paroisses avaient été estimées suffisantes. Lorsque la loi de séparation fut votée en 1905, elles étaient montées au nombre de trente-sept ; la trente-huitième est née hier et deux autres, dit-on, se préparent