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un savon, une ombrelle, un poignard, une petite hache, un carton, une lampe de nuit, une chandelle, une bougie, un chandelier de bois, un ballon, une perruque, une brosse à bains, un fouet, de la poudre pour les dents, une lanterne de corne ou de vessie, une flûte, des sandales, un fichu, une pie, un perroquet, un corbeau, un rossignol, des férules, un balai ; que sais-je encore ? tout ce qui se donne en cadeau dans ces jours maudits consacrés aux cadeaux. Fais-moi des inscriptions pour toutes ces bagatelles peu coûteuses, et tu en seras bien récompensé !

Victime et témoin de l’insolence de cet homme, je fus près de me révolter et de me montrer enfin un homme, un chevalier, un poëte ; mais la misère me courba encore la face contre terre. Je pris donc les tablettes qu’on me présentait, et sur autant de feuilles séparées j’écrivis des inscriptions en vers. Les vers valaient mieux que les objets ridicules qu’ils annonçaient. Si tu savais, mon ami, combien j’étais malheureux quand je prostituais ainsi ma poésie, et quel horrible métier c’était là !

De grâce ! épargne les reproches : tu ne saurais dire sur ces bagatelles plus que je n’en dis moi-même. J’improvisai donc toutes sortes de vers : « Sur des tablettes à cinq feuilles sont décernés les honneurs suprêmes. — Ces tablettes à trois feuilles t’annoncent la visite de ta maîtresse. — Les tablettes de parchemin enduites de cire te servent à corriger tes vers. — Les tablettes vitelliennes t’annoncent chez tes amours. — Dans un pot de cette terre Fronton, le maître de Marc-Aurèle, buvait son eau. — Ton esclave peut briser, sans craindre le fouet, ces coupes de Sagonte. — Memphis t’envoie cette robe de chambre brodée. »

Quand j’eus achevé ce travail, je fus accueilli par un murmure flatteur de l’assemblée. — Très bien dit ! s’écria Scévola ; Martial, voilà des vers qui feront passer mes présents. Je t’enverrai avant peu une demi-livre de poivre.

— Vous aviez, lui dis-je, l’habitude de me donner chaque