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femmes d’Italie la prenaient pour une Romaine, les femmes de l’Attique pour une Athénienne) ; Cerellia, morte dans les flots à Baies ; Gellia la courtisane, beauté qui descendait des vieux Brutus, ô honte ! — Voilà, dites-vous, bien des amours, Martial ! Mais Ovide, Horace, Tibulle, Catulle ont lait ainsi. Qui ne sait les noms charmants de leurs amours ? L’amour est la vie et la gloire du poëte !

Quand j’étais jeune, je voulais que ma maîtresse eut vingt ans, de belles dents, un frais sourire, de longs cheveux ; qu’elle fût parée ; et je renvoyais à Flaccus sa chanteuse Livie qu’il m’avait adressée, avec ce petit billet : « Je ne veux pas, Flaccus, d’une maîtresse efflanquée, à qui mes bagues pourraient servir de bracelets, qui me poignarde de ses genoux, et dont l’échiné est dentelée comme une scie. Je ne veux pas davantage d’une maîtresse qui pèserait un millier : j’aime la chair, non la graisse. »

Maintenant que j’ai parlé de mes amitiés et de mes amours, me sera-t-il permis de parler aussi de mes ouvrages ? Je sais que j’ai bien à les défendre : ils ont été attaqués en même temps par de très honnêtes gens et par les plus vils des homme » ; les Zoïles de mon temps ne m’ont pas laissé de relâche, tant ils avaient le désir de voir leurs noms fangeux écrits dans mes vers. J’ai refusé de répondre aux Zoïles : je dois répondre aux honnêtes gens. Les reproches que me font ceux-là sont de plusieurs sortes, mais ils ne sont pas sans réplique. Les uns trouvent mes vers trop libres ; on ne peut pas, disent-ils, les lire dans une école. Il est vrai qua mes vers ne sont pas faits pour les écoles ; ce sont des vers enjoués, qui pour plaire ont besoin d’une pointé un peu grivoise. D’autres se récrient que souvent mon vers mord jusqu’au sang et fait une blessure cruelle ; mais qui dit épigramme ne dit pas une fade louange. L’épigramme est déjà bien assez difficile à écrire sans lui ôter sa méchanceté piquante.

Dans mon esprit, je mets le faiseur d’épigrammes bien