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quartier de Suburra. Là s’élève le riche palais d’un consul, mon ami, l’éloquent Stella, qui couronne ses pénates du laurier poétique, et plonge ses lèvres dans l’eau limpide de Castalie. Protégé par Stella, le peuple, les sénateurs, les chevaliers te liront sans peine. Puissent-ils, comme autrefois, dès les premières lignes, s’écrier : Vivat ! Voilà un livre de Martial !

Où en étais-je resté à la première partie de cette autobiographie qu’on pourrait appeler (mais tant de hardiesse n’est pas faite pour nous) les Commentaires de Martial ? A coup sûr, en quelque endroit que j’en sois resté, je suis resté à quelque humiliation, à quelque misère. Même, à présent que j’y pense, je ne vous ai raconté que la moindre part de mes souffrances.

Qu’ai-je fait, quelles imperceptibles misères vous ai-je racontées ? Il s’agissait bien, ma foi ! de l’avarice de Tulla, empoisonnant d’un Ain frelaté le vin pur de la Campanie ; des quatre dents de la vieille Élia, qui m’en crachait deux au visage ; de l’ivrognerie de Sextilianus dans les cabarets les plus diffamés, des plagiats de Fidcntinus, de la maîtresse de Régulus, du petit chien de Munimia, — de Fescennina la buveuse, du ventre affamé de Nomencianus, de la voix d’Églé, rauque tant qu’Églé fut jeune et belle, et qui est redevenue douce et flûtée ! Non, non, ce n’est pas là toute ma vie ; il est impossible que tout l’esprit et tout le cœur que les dieux m’avaient donnés se soient usés à ces petits commérages, l’amusement des riches et des sénateurs de Rome. Non certes, Martial le poète, qui admirait avec passion Horace et Virgile ; qui se prosternait devant le génie de Lucain, tué par Néron ; qui fut l’ami du grave satirique Juvénal, Martial n’a pu perdre ainsi son génie à creuser un grand trou parmi les roseaux pour proclamer les oreilles du roi Midas. Patience ! ah ! patience ! et, laissant de côté mes commencements misérables, laissez-moi vous signaler quelques belles poésies sans fiel.