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gaulois et romains

biga. Les Volces devinrent seulement des fédérés ou alliés (118 av. J.-C.).

Soixante-dix ans plus tard, César acheva la conquête. À l’instigation des Arvernes et du noble patriote Vercingétorix, toute la Gaule s’était levée en masse (grande ligue des Arvernes). Les Gabales, les Ruthènes et leurs voisins les Cadurques (Cahors) se jetèrent sur la Province, ayant à leur tête Lucterius.

César fut repoussé à Gergovia (près Clermont-Ferrand), où la déroute des légions fut complète (52 av. J.-C.). La chute d’Alesia et la reddition de Vercingétorix le vengèrent, mais n’abattirent pas l’insurrection : une dernière fois elle éclata et prit pour boulevard suprême Uxellodnnum (Puy-d’Issolu), sur la rive droite de la Dordogne, au bord même de la région des Causses, entre Brive et Figeac ; les Cadurques et les Ruthènes portaient tout le poids de la résistance. On sait comment César fit capituler la place en détournant, par des galeries souterraines, la source qui l’alimentait. Le chef gaulois Drappès « fait prisonnier… se laissa mourir de faim… César fit couper les mains à tous ceux qui avaient porté les armes ; mais il épargna leur vie, afin qu’ils fussent un témoignage visible des châtiments de Rome… La Gaule ainsi déposait, pour la dernière fois, les armes, ou du moins les armes lui tombaient des mains (51 av. J.-C.). » (Amédée Thierry, Histoire des Gaulois, t. III, chap. ix.)

L’occupation romaine a laissé comme traces de nombreuses inscriptions, l’important monument de Lanuéjols (V. p. 259), et quelques vestiges de voies antiques. Sur ces dernières il importe d’insister quelque peu.

Un monument des plus précieux de la géographie ancienne, la table de Peutinger, nous renseigne sur les routes romaines de la région des Causses[1].

Deux principales y sont indiquées.

La première, de Lyon à Bordeaux, traversait Condate, Anderitum, Ad Silanum et Segondum. C’était la voie d’Agrippa.

La deuxième, de Segondum à l’embouchure de l’Hérault, passait par Condatemago et Loteva.

Nous allons résumer brièvement les assimilations faites par les différents auteurs au sujet de ces noms.

Condate serait Monistrol-d’Allier (d’Anville), ou Chanteuge, près Langeac (Ukert), ou encore Chapeauroux, etc.

Anderitum fut, nous l’avons vu, la capitale des Gabales : tout porte à croire que c’est le Javols actuel (entre la Margeride et l’Aubrac (V. p. 262), car on a trouvé là de nombreux débris romains : colonnes, bains, aqueducs, médailles, vases, lampes, borne milliaire, etc. (d’Anville, Commission des Gaules.) Cependant Walckenaer et Desjardins voudraient placer Anderitum à Anterrieux (Cantal), où les vestiges romains n’ont pas manqué non plus ; ils font de Javols le site de Gabali ou Urbs gabalitana, qui serait alors distinct d’Anderitum. Ad Silanum passe pour n’avoir été qu’un relai, un poste peu important ; Walckenaer, d’Anville, Ukert, etc., se contredisent tous. Le docteur Prunières a cru trouver Ad Silanum au bord même du plateau d’Aubrac, entre Aubrac et le lac Saint-Andéol, à la ferme du Mas-Crémat. (V. p. 279.)

  1. La table de Peutinger est la copie, faite au xiiie siècle par un moine de Colmar, d’une carte routière du monde romain, dressée sans doute sous Théodose. Le document primitif est perdu, mais l’original du xiiie siècle est précieusement conservé à la bibliothèque impériale de Vienne. Il doit son nom à Conrad Peutinger, antiquaire d’Augsbourg, qui le découvrit à Spire à la fin du xve siècle. M. Ernest Desjardins a donné le meilleur commentaire et la plus belle reproduction de la Table de Peutinger.