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les cévennes

intéresser réellement que les archéologues, qui, d’ailleurs, les trouvent très curieuses.

Au nord de Chastel-Nouvel, la route de Saint-Flour traverse, entre les sources de la Colagne et de la Truyère (deux affluents du Lot qui circonscrivent l’Aubrac), les plateaux, véritables parcs, frais et bien arrosés, de Saint-Amans, Serverette, Aumont, Saint-Chély-d’Apcher, où passe aussi, plus à l’ouest, le chemin de fer, dit grand Central français, de Neussargues à Marvejols (Clermont-Ferrand à Millau) ; c’est une jolie région de pelouses, de bouquets d’arbres, de clairs ruisseaux, unissant l’âpre Margeride au solitaire Aubrac. Entre Serverette et Aumont, Javols (l’ancienne Anderitum) se cache au fond du vallon du Triboulin, petit affluent de la Truyère : Javols, l’antique cité des Gabales, d’où, pour le musée de Mende, on a extrait tant de débris romains. On y a retrouvé aussi des traces de l’ancienne voie d’Agrippa, qui allait de Lyon à Toulouse. (V. chap. XXVIII.)

Le grand Central français peut être considéré comme la limite orientale de l’Aubrac ; c’est la plus courte ligne de Paris à Barcelone (1,108 kil.), par le Bourbonnais, Clermont-Ferrand, Issoire, Arvant, Neussargues (près Murat). Saint-Flour, l’audacieux pont en fer de Garabit (haut de 122m,20, long de 564m,65, avec une arcade centrale de 165m d’ouverture, 177m,72 d’axe en axe des piles), célèbre aujourd’hui dans le monde entier comme l’un des plus grandioses travaux d’art existant, et dû à MM. Boyer, l’ingénieur si regretté (mort à Panama en 1886), et Eiffel (1882-1885)[1] ; Saint-Chély-d’Apcher, Aumont, le viaduc en pierre de la Crueize, haut de 63m,30, Marvejols, le Monastier (embranchement de Mende), Banassac (route de la Malène), Sévérac-le-Château (bifurcation de Rodez), Aguessac, Millau, Tournemire (embranchement de Saint-Affrique), Montpaon, Bédarieux (embranchement de Graissessac), Béziers (bifurcation de Cette), Narbonne (bifurcation de Toulouse et Bordeaux), Perpignan, Port-Vendres et Port-Bou. Le tronçon le dernier achevé, celui de Neussargues à Saint-Flour (18 kil.), n’a été ouvert que le 10 novembre 1888 ; la section (37 kil.) de Saint-Flour à Saint-Chély, où se trouve le pont de Garabit, avait été livrée à la circulation le 27 mai 1888 ; la voie traverse des terrains très mouvementés et s’élève très haut (maximum, près Saint-Chély-d’Apcher, 1,056 m.) ; elle est unique dans la traversée du plateau central et des Cévennes ; les trains express (!!!) s’y arrêtent à presque toutes les stations ; l’ensemble de la ligne appartient à trois compagnies différentes (P.-L.-M., Orléans, Midi), réunion de circonstances bien défavorables à l’établissement d’un service rapide et direct, à correspondances continues, vers l’Espagne méditerranéenne. Mende, toutefois, a vu diminuer ainsi de deux à trois heures la durée du trajet qui la sépare de Paris, et les communications avec la région des Causses ont été grandement facilitées, car deux chemins de fer au lieu d’un la mettent en relation immédiate avec le centre et le nord de la France[2].

Pour sortir des Causses (ou pour y entrer), la route de Langogne rejoint la ligne

    E. Cartailhac, Matériaux pour l’histoire primitive de l’homme ; 1877, t. VIII, p. 526 ; — abbé Boissonnade, Bulletin de la section de la Lozère du Club alpin français, nos  1 et 2, 1886 et 1887.

  1. On va construire, dans le Tarn, pour faire franchir à une voie ferrée la profonde vallée du Viaur, un viaduc de 460 mètres de long, dont l’arche centrale aura 250 d’ouverture et 116m,80 au-dessus de la rivière. — Au pont du Forth (Écosse), inauguré en 1890, les deux principales travées ont chacune 583 mètres d’ouverture. — Le viaduc de 38 kilomètres de longueur projeté sur la Manche pour unir la France à l’Angleterre se composerait de travées ayant alternativement 300 et 500 mètres de portée. Ce sont là les plus grands ponts de fer. — Aux États-Unis il y en a de dimensions analogues, mais suspendus (Brooklyn-New-York [486 m.]), etc.
  2. Chemin de fer de Marvejols (Lozère) à Neussargues (Cantal) ; Viaduc de Garabit sur la Truyère, par Léon