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le larzac


CHAPITRE XIII

le larzac.


Le plus grand des Causses. — Les troupeaux transhumants. — Les routes. — Tournemire et Roquefort. — Cornus, exil des juges de paix. — Source de la Sorgues. — L’avenc du Mas-Raynal. — Mourèze. — Lodève. — Saint-Michel-de-Grammont. — La Fin du monde. — Le pas de l’Escalette. — Le plateau du Spleen. — Les Templiers. — Sorbs et la Couvertoirade.


Le Larzac (larges roches, larga saxa) est le plus grand, le moins élevé, le plus connu, le moins beau des Causses.

Orienté du nord-ouest au sud-est, il a ce remarquable caractère de chevaucher sur les deux versants de l’Atlantique et de la Méditerranée, de s’asseoir sur l’axe hydrographique des Cévennes en l’empâtant, et de dispenser autant d’eau au Tarn qu’aux fleuves d’Agde et de Béziers. (V. p. 18.)

Bien tranchées sont ses limites : le Tarn au nord, la voie ferrée de Millau à Béziers vers le sud-ouest, Lodève et l’Hérault au sud-est, la Vis, la Virenque et la Dourbie au nord-est.

Comme un bloc de pierre par une tige rigide, il semble transpercé par les Cévennes, qui pénètrent déprimées sous sa masse au col de Sauclières, à 793 mètres, et en ressortent plus bas encore, au col de Montpaon, à 675 mètres et 25 kilomètres plus loin. Ainsi ce grand corps a l’air d’être attaché par son milieu.

Quatre vraies vallées où coulent d’authentiques cours d’eau l’échancrent profondément à l’ouest et au sud : deux vouées au Tarn, le Cernon et la Sorgues ; deux à la Méditerranée, l’Orb et la Lergue ou l’Ergue.

Deux de ses angles s’effilent en véritables chaînes de montagnes : l’un, au sud, projette l’Escandorgue, calcaire et volcanique (765, 735 et 697 m.), entre Lodève et Bédarieux ; l’autre, au sud-est, allonge jusqu’à Ganges la haute Séranne (943 m.), formant rempart sur la rive droite de l’Hérault, qu’elle sépare de son affluent la Vis.

Sibérie glaciale et dangereuse pour le voyageur en hiver, il devient en été une torride Arabie Pétrée.

« Il va des falaises que Millau contemple au-dessus de la rive gauche de sa rivière jusqu’aux fières parois du pas de l’Escalette, près de Lodève. En gravissant les hauteurs à l’est de Saint-Affrique, on entre dans le causse de Roquefort, séparé du Larzac proprement dit par le val du Soulsou et le val du Cernon ; puis, ce bas-fond franchi, quand on atteint les créneaux de la roche, on a devant soi la vaste expansion du Larzac, jusqu’aux montagnes de Ganges et du Vigan.

« Des crêtes de Millau jusqu’au fronton de l’Escalette il y a plus de 40 kilomètres ; 55 des crêtes de Saint-Affrique aux rochers de la Tude ; et le Larzac prend 103,000 hectares sur les 53 millions de la France…

« C’est le plus mouillé des Causses. Nul n’offre une brèche plus basse, une meilleure échancrure aux vents qui veulent passer sur notre ligne d’entre deux mers, les uns de Méditerranée à Océan, les autres d’Atlantique à Méditerranée. Parties tièdes ou chaudes de la vague marine, ces aures se refroidissent en mon-