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Retournons à mes biographies classiques.

Un franc et loyal camarade, Georges Anthony, auquel on avait donné le sobriquet de cheval, je ne sais plus pourquoi, était entré, comme sergent, en 1811, dans un régiment d’infanterie légère, composé de Piémontais, et qui s’était organisé à Besançon. Georges a péri misérablement avec une foule de nos soldats, dans un hôpital incendié, lors de la retraite de Moscou ; il avait été blessé grièvement à Smolensk. Ses deux frères, Joseph et Félix, sont morts à un âge peu avancé : c’étaient de mes meilleurs camarades, dont mon mariage m’avait fait devenir le cousin. Joseph était un homme de bien, un parfait citoyen, dans toute la bonne acception de ce mot. Il était extrêmement considéré et aimé en Bourgogne, où il faisait valoir les forges de Lycée. Sa mort a été regardée par les populations comme une calamité publique. Il avait épousé sa cousine germaine, Césarine Henry de Marcilly, dont il n’a eu que des filles.

Son frère Félix, qui, comme lieutenant, servit longtemps dans les dragons, et quitta le service pour devenir l’associé de Joseph, avait un grand sens, de l’esprit d’ordre et de l’intelligence, mais il était d’une nature abrupte, à laquelle le frottement du monde n’avait pas enlevé toutes ses aspérités. Au lycée, il n’avait d’autre langage avec ses camarades que les coups de poing ou les coups d’épaule, et les nouveaux élèves croyaient que c’était sa seule manière de s’exprimer. Félix avait épousé en premières noces sa cousine