Page:Marquiset,À travers ma vie,1904.djvu/34

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

tard, comme ministre, de véritables services à son pays en prenant l’initiative de l’économie pratique, mais son caractère bienveillant s’endurcit un peu avec l’âge. Mon père s’était épris d’une tendresse marquée pour lui, et M. Humann rendait à son ami de Franche-Comté affection pour affection, comme en font foi les nombreuses lettres de lui que je possède encore. C’est chez mon père qu’il connut un des orateurs les plus influents de la Chambre des députés, dont il cherchait l’appui pour l’importante question du monopole des tabacs. Je veux parler de M. Courvoisier[1].

Cet homme, qui tenait à notre famille, et dans l’intimité duquel les miens ont vécu, a toujours été considéré par nous comme un second père. Grand, mince, distingué autant au physique qu’au moral, M. Courvoisier avait une voix claire et douce qu’il maniait délicieusement dans les conversations et les veilles aux-

  1. Courvoisier (Jean-Joseph-Antoine), né à Besançon en 1770, mort à Lyon en 1835. Fils d’un professeur à l’Université de Besançon, il émigra avec lui, servit à l’armée de Condé, dans les cavaliers nobles, les hussards de Rohan, les chasseurs de Bussy où il reçut la croix de Saint-Louis, puis dans le régiment hongrois des hussards de l’empereur d’Autriche avec lequel il combattit à Marengo contre les Français. Rentré en France à la fin de 1802, il se fit recevoir avocat, devint conseiller-auditeur à la cour de Besançon en 1808, et fut nommé député du Doubs le 4 octobre 1816, poste qu’il occupa jusqu’en 1824 après avoir été vice-président de la Chambre. Il était procureur général à Lyon quand Charles X le nomma garde des sceaux le 8 août 1829, mais ne pouvant partager les malheureuses idées du roi et de M. de Polignac, il remit son portefeuille le 19 mai 1830. Nommé le même jour ministre d’État et membre du Conseil privé, il sortit de la vie politique à la révolution de juillet.