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de bataille de Waterloo rendit pour nous cette journée si fatale. Restée veuve sans enfants et aussi sans fortune, Mme  de Görtz a supporté son malheur avec un courage et une philosophie qui lui ont fait à Tours, où elle habite pendant l’hiver, de nombreux amis ; elle passe ordinairement la belle saison dans la famille du général Auguste de la Rochejacquelein et dans celle de M. de la Taille, qui l’accaparent à l’envi et l’arrachent le plus qu’ils peuvent à ses affections de la ville ; parmi ces dernières, figurent au premier rang mon ancien collègue à la préfecture de Versailles, Alexandre de Fleury, secrétaire général d’Indre-et-Loire, et Mme  de Fleury, sa femme.

Mme  de Görtz, dont la conversation est toujours gaie, vive, animée, s’exprime aussi facilement en français que dans sa langue maternelle, mais avec un léger accent allemand qui donne à ses paroles une grâce infinie. D’un esprit juste et sans aigreur, pleine de tact, de bienveillance pour tous, elle apporte dans le commerce du monde des relations douces et faciles, et l’ensemble de toute sa personne en fait un être privilégié que chacun recherche. Malgré ses excellentes qualités, Mme  de Görtz n’est pas à l’abri des malins propos que son isolement provoque parfois chez les personnes même les plus inoffensives. A-t-elle quelque peccadille, quelque faute légère à se reprocher ? Je l’ignore, mais ce que je sais, c’est qu’elle est une séduisante créature, qu’elle a dû être soumise et qu’elle est soumise tous les jours à de bien dangereuses