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de bains, dans les hôtels et de dire un mot de la société cosmopolite qui s’y trouve réunie. Cette société, comme une colonie au milieu d’un peuple étranger, retrouve à Louèche les mœurs et le langage de son pays et, ce qui vaut mieux encore, l’esprit et la conversation de ses compatriotes.

Aux eaux, les connaissances se font vite ; on se voit à chaque heure du jour, à chaque heure du soir ; on se voit tout à fait en déshabillé, c’est le cas de le dire, puisque les hommes et les femmes se baignent pêle-mêle dans une grande piscine dont l’eau terne, chargée de petites bulles graisseuses, effraie parfois les plus aguerris. Cette habitude d’être constamment ensemble dans l’eau, à table, au salon, dans les promenades, a son mauvais côté : c’est de vous mettre en rapports trop continuels avec les hommes, leurs défauts, voire même leurs mauvaises passions. Il est difficile de se contraindre six semaines de suite pendant seize heures sur vingt quatre, et s’il est quelques rares personnes qui gagnent à ce contact incessant, la masse de la société, en revanche, y perd beaucoup.

Voici quelques silhouettes que j’ai tâché d’esquisser des personnages les plus saillants :

LA BARONNE D’ALT

Au premier aspect, on croirait que Mme  d’Alt cherche, par ses manières excentriques, à attirer sur elle l’attention générale ; son œil noir, un peu terne, que recouvre un épais sourcil, reste toujours ouvert et béant