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pela ces messieurs de sa fenêtre, et leur fit donner un poulet froid avec du vin de Bordeaux. Ils mangèrent avec appétit et burent à l’avenant. On remarque avec satisfaction que le chagrin de quitter sa famille captive et d’abandonner sa patrie n’a point affligé le prince et son fidèle compagnon, et que le triste souvenir d’un pays en butte à toutes les horreurs de la guerre civile ne troublait pas leur digestion[1].

Quand parut l’écrit dont nous parlons, chacun s’empressa de se le procurer et plusieurs éditions furent épuisées en très peu de temps. J’avoue que la curiosité me poussa comme les autres, et que la lecture de cette production faite un soir devant un assez nombreux auditoire fut bien mal et bien irrévérencieusement accueillie. En fermant le livre, je pensai comme cet habitant de Pékin qui, croyant que son empereur faisait du musc, courut certain jour, pour s’en assurer, derrière une haie où le souverain venait de s’arrêter et s’écria : « Mon Dieu, ça sent encore plus mauvais que ce que je fais ! »


Revenu en Franche-Comté à la suite de ma révocation, j’épousai, le 21 septembre 1825, une compatriote,

  1. Voici ce qu’à ce propos rimait l’opposition :

    Du Voyage à Coblentz quel est le noble auteur ?
    À ce style de cuisine,
    À ce gigot de la voisine,
    Aux pigeons à la crapaudine
    Chacun dit : c’est le restaurateur
    D’un pays dégradé que le ventre domine.