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tout à coup, un sourire, sourire dont elle est toujours avare, effleura ses lèvres, et le dialogue suivant s’établit entre elle et moi :

La princesse. — Ah ! vous allez dans la Lozère ?

Moi. — Oui, Madame.

La princesse. — La Lozère n’est-elle pas l’ancien Gévaudan ?

Moi. — Oui, Madame.

La princesse. — Ah ! mon Dieu ! c’est le pays de la bête ?

Moi. — Oui, Madame.

La princesse. — A-t-on jamais su ce que c’était que cette bête et d’où elle sortait ?

Moi. — Oui, Madame ; c’était une hyène qui s’était échappée d’une ménagerie ambulante et qui était venue se réfugier dans les montagnes de la Lozère. Elle causait de grands ravages et jetait l’épouvante dans toute la province. Une compagnie de dragons, envoyée par ordre de votre auguste père pour la traquer, en délivra le pays.

La princesse. — Je me rappelle toujours la frayeur dont j’étais saisie dans mon enfance lorsqu’on me racontait l’histoire de la bête du Gévaudan. — Quel est votre préfet, non pas à propos de bête, je vous prie ?

Moi. — M. Moreau, Madame.

La princesse. — Est-ce le frère du maréchal ?

Moi. — Oui, Madame, c’est le frère cadet.

La princesse. — Avec un homme qui porte le nom de Moreau, vous devez vous trouver heureux ?