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puis ces jeunes filles avaient du talent ; elles étaient jolies, gaies, vives et légères…

Donc, un soir, malgré la sage recommandation de notre préfet, nous nous étions, Fleury et moi, glissés furtivement, dans un entr’acte, près de la jeune première et de la soubrette. Nous avions avec elles une conversation des plus intéressantes, des plus animées, lorsque nous nous aperçûmes que Mlle  Stéphanie des Touches, qui par le plus grand des hasards était venue ce jour-là au spectacle, nous observait en souriant à travers le petit washistass (le diable m’emporte, si je sais comment s écrit ce nom germanique) qui donnait sur la scène. Nous demeurâmes confondus l’un et l’autre, et ce fut bien pis encore quand nous vîmes quatre ou cinq têtes de jeunes personnes avides de savourer notre embarras se succéder curieusement à ce maudit guichet. C’étaient Mlles  de Lalonde, les filles du maire de Versailles. Elles étaient venues, sans la faire prévenir à l’avance, prendre leur amie de la préfecture pour aller ensemble à la première représentation du Petit Chaperon rouge que l’on donnait le soir même.

En découvrant ces dames, Fleury et moi nous opérâmes notre retraite le plus lestement possible derrière une des toiles du théâtre, mais il était trop tard, nous avions été vus et aucun de nous n’osa rentrer dans la loge de la préfecture où il aurait eu à subir, sans pouvoir se défendre, un feu roulant de plaisanteries et de malices féminines. Nous prîmes le prudent parti de nous retirer dans nos appartements où, après avoir