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qui se termina fort avant dans la nuit. L’heure de la séparation venue et les têtes se trouvant un peu échauffées, d’Authume, garde à la compagnie d’Havré, Suremain, sous-lieutenant aux chasseurs de la garde royale, et moi, nous rentrâmes à pied pour nous baigner un peu le front dans l’air frais. La conversation devait rouler sur un sujet palpitant dont je n’ai plus le moindre souvenir, et nous discutions ferme le long des rues, lorsqu’en traversant le Roule, nous aperçûmes à quelques pas de nous une voiture de place arrêtée devant un hôtel. — « Tiens ! un amoureux, » fit d’Authume. Au moment où nous arrivions à hauteur du fiacre, la porte de la maison s’ouvrit à ma droite et un homme sortit si brusquement qu’il me bouscula en s’écriant : « Sacrebleu ! vous avez donc les yeux dans vos poches ? — Et vous, dans vos talons ? » répondis-je irrité. Ma phrase ne fut pas entendue, car le monsieur s’était jeté dans la voiture qui filait au grand trot. « Eh bien ! me dit d’Authume, je ne vous conseille pas d’aller lui demander jamais un chapeau de préfet. — Qui est-ce donc ? Vous le connaissez ? » fis-je avec étonnement. Mes deux amis un peu interloqués me jetèrent un nom qui, vu l’heure et la situation, ne me stupéfia point. C’est la seule fois de ma vie où j’ai eu l’honneur d’adresser la parole à S. A. R. Mgr le duc de Berry[1].

  1. Le duc ne sortait-il pas de chez Virginie Oreille ? Elle habitait alors 8, rue de Valois. 1
    13 janvier 1815. On raconte que S. A. R. Mgrr le duc de Berry est sou-