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chemin de fer de Besançon à Dijon ; sa femme, en apprenant la ruine de ses enfants, est morte de chagrin quelques mois avant l’éclat de la catastrophe. Charles Curasson, d’un caractère doux et bienveillant, avait attiré à lui toutes les affections pendant son opulence, aussi les sympathies ne lui manquèrent jamais dans son adversité.

Cette anecdote fournit un sérieux enseignement. C’est toujours une grave inconséquence, une lourde faute que de changer de religion ou de caste. Si M. Curasson père, au lieu d’oublier ou de tâcher de faire oublier qu’il était homme de peu, comme dit si impertinemment l’aristocratique Saint-Simon, eût mis son orgueil à être le fils de ses œuvres, il pouvait à son aise devenir royaliste sans pour cela cesser d’être plébéien ; mais vouloir faire de la gentilhommerie à tout prix, c’est de la maladresse. Charles, héritant de tels principes, aurait continué la carrière qu’il avait choisie et qu’il aimait, il aurait conservé ses cinquante mille livres de rente, sa femme qu’il adorait et aucune position ne serait aujourd’hui dans nos pays plus heureuse, plus puissante que la sienne.

La paix rétablie en France, on s’occupa de mon avenir. M. le baron des Touches[1], nommé récemment

  1. Des Touches (Alexandre-Guillaume-Étienne-Hersent, baron), né à Paris le 31 mars 1773, mort à Bretels (Sarthe), le 8 juin 1826. Fils d’un employé supérieur des finances, il fut sous-préfet de la Rochelle en 1803, préfet du Jura en 1809, de la Haute-Garonne en 1813, d’Indre--