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je fasse je n’ai point d’affaires qui m’empêchent de partir, si vous croyez que je sois nécessaire à Paris. Hélas ! je n’en ai plus qu’une dans le monde : je sens que je vous aime tous les jours davantage ; si nous pouvions vivre ensemble, vous feriez tout mon bonheur, et je ne songerais qu’au vôtre.

Je me dis quelquefois, pour me consoler de tout ce que je souffre, qu’il n’y a qu’à vouloir fortement pour lasser tout le monde et pour venir à bout de ce qu’on veut ; enfin il n’y a qu’à aimer toujours, et peut-on cesser d’aimer ? Assurez-moi de vous, et je viendrai à bout du reste. Mais, pendant que je passe mes jours à vous donner des marques d’un attachement qui ne peut finir qu’avec moi, j’ai tout à craindre de vous l’absence, les mauvais offices, votre repos que je trouble, tout contribuera à me chasser de votre cœur, et je n’aurai plus qu’à mourir ; le poison n’est pas si assuré.

Au milieu de tout le mal que vous me faites, je vous avoue que j’ai été touché du soin que vous avez pris de chercher sur la carte ce bois[1] que j’aime, et de l’inquiétude que vous avez eue que les Anglais ne l’eussent brûlé dans le temps qu’ils

  1. Le bois du Montcanisy (Note de l’éd. 1756). En Basse-Normandie. Lassay y avait aussi un château.