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Le beau present qu’elle m’avoit donné,
Puis que parler à vous ne puis, et n’ose,
Que puis je faire orendroit aultre chose,
Fors par escript nouvelles vous mander,
De mon ennuy, et vous recommander
Le cueur, de moy, dont avez jouyssance ?
Le cueur, sur qui nulle autre n’a puissance,
Le cueur qui fut de franchise interdict,
Quand prisonnier en vos mains se rendit,
Et de rechef prisonnier confermé
Avecques vous en la Tour enfermé.
Je vous supply par celluy dur tourment,
Que nous souffront pour aymer loyaulment,
Qu’entre voz mains il fasse sa demeure,
Jusques à temps, que l’ung, ou l’autre meure.
Tandis Fortune avec cours temporel
Se changera suivant son naturel :
Et ne nous est si dure, et mal prospere,
Comme paisible, et bonne je l’espere.
Parquoy Amye or vous reconfortez
En cest espoir, et constamment portez
L’une moictié de l’infortune forte :
L’autre moictié croyez que je la porte :
Mais où sont ceulx, qui ont eu leur desir
En amytié sans quelcque desplaisir ?
Il n’en est point certes, et n’en fut oncques,
Et n’en sera. Ne vous estonnez doncques,
Car j’aperçoy de loing venir le temps,
Que nous serons plus, que jamais, contens,
Et que de moy serez encor servie.
Sans nul danger, et en despit d’Envie.

XXV

Pour Monsieur Se Barrois
a ma damoiselle de Huban

Le Serviteur de vous, chere Maistresse,
D’ung triste cueur cest escript vous adresse