Page:Marot - Les Œuvres, t. 5, éd. Guiffrey, 1931.djvu/68

Cette page n’a pas encore été corrigée

De Jehan Chauvun, menestrier

Chauvin sonnant sur Seine les Aulbades,
Donna tel aise aux gentilles Nayades,
Que l’ung pour tous des aquatiques Dieux
Parla ainsi. Le son melodieux
De ce Chauvin, Freres, nous pourroit nuire
Par traict de temps, et noz femmez seduire
Jusqu’à les faire yssir de la clere unde,
Pour habiter la Terre large, et ronde.
Ne feit au chant de son Psalterion
Sortir des eaues les Daulphins Arion ?
Ne tira pas Orpheus Euridice
Hors des Enfers ? Cela nous est indice,
Que cestuy cy, qui mieulx que ces deux sonne,
Et qui tant est gratieuse personne,
Nous pourroit bien noz Nymphes suborner.
Ces motz finiz, se prindrent à tourner
Ces Dieux jaloux au tour de la Nasselle
Du bon Chauvin, et renversans icelle,
L’ont en leurs caves plongé, et suffocqué :
Puis chascun d’eulx des Nymphes s’est mocqué
En leur disant, venez Dames venez,
Voicy Chauvin, que si cher vous tenez :
Commandez luy, que dancer il vous fasse.