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Ton noble port, on maintien asseuré,
Ton chant si doulx, ton parler mesuré,
Ton propre habit, qui tant bien se conforme
Au naturel de ta tresbelle forme :
Brief, tous les dons, et grâces, et vertus,
Dont tes espritz sont ornez, et vestus,
Ne m’ont induict à t’offrir le service
De mon las cueur plein d’amour sans malice.
Ce fut (pour vray) le doulx traict de tes yeux,
Et de ta bouche aulcuns motz gracieux,
Qui de bien loing me vindrent faire entendre
Secretement, qu’à m’aymer vouloys tendre.
Lors tout ravy (pource que je pensay
Que tu m’aymois) à t’aymer commencay :
Et pour certain aymer je n’eusse sceu,
Si de l’amour ne me feusse apperceu,
Car tout ainsi que flamme engendre flamme,
Fault que m’amour par aultre amour s’enflamme.
Et qui diroit que tu as faict la faincte
Pour me donner d’amour aulcune estraincte,
Je dy que non, croyant que mocquerie
En si bon lieu ne peult estre cherie.
Ton cueur est droict, quoy qu’il soit rigoreux,
Et du mien (las) seroit tout amoureux,
Si ce n’estoit fascheuse deffiance,
Qui à grand tort me pourchasse oubliance.
Tu crains (pour vray) que mon affection
Soit composée avecques fiction.
Esprouve moy. Quand m’auras esprouvé,