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LIVRE XX



Les événemens dont je viens de rappeler le souvenir ont tellement occupé ma pensée qu’à travers tant de calamités publiques je me suis presque oublié moi-même. L’impression que faisoit sur moi cette foule de malheureux étoit si vive et si profonde qu’il est bien naturel que ce qui ne touchoit que moi me soit très souvent échappé. Ce n’est pas cependant que, par des diversions de travail et d’études, je n’eusse tâché de me défendre de ces réflexions fatigantes dont la continuité pouvoit se terminer par une noire mélancolie ou par une fixité d’idées, plus dangereuse encore pour le foible et fragile organe du bon sens.

Tant que mon imagination put me distraire par d’amusantes rêveries, je fis de nouveaux Contes, moins enjoués que ceux que j’avois faits dans les