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nous pas vu que, du centre aux extrémités du royaume, ce nom de liberté, ce nom qui, pour la populace, ne veut dire que la licence ; a retenti comme un signal d’insurrection et d’anarchie ? La police parmi le peuple, la discipline dans les armées, partout les lois de l’ordre ont été dénoncées comme des restes de servitude. L’indépendance et le mépris de toute espèce d’autorité, voilà ce que présente la face du royaume ; et c’est sur les ruines de la monarchie et avec ses débris que l’on se vante de créer un empire démocratique. C’est un vil ramas de vagabonds sans mœurs, sans état, sans aveu, qu’on appelle le peuple souverain. Mais la nation désire, elle demande que la constitution du royaume soit réglée et fixée sur des bases fondamentales, et il s’agit de la rendre à la fois plus régulière et plus constante. C’est à quoi, Sire, les États sont chargés de travailler avec vous. Par cette ancienne et vénérable constitution de la monarchie, vous êtes roi ; l’autorité suprême, la force exécutive a été remise en vos mains ; vos ancêtres, à qui la nation l’a confiée, vous l’ont transmise en héritage. La nation ne veut ni n’entend dépouiller, déposer, déshériter son roi. Et que seroit-ce qu’un monarque, si ce n’étoit pas le protecteur de tous les droits et de toutes les libertés ?

« Protégez, Sire, celle de tous les ordres, et n’en laissez opprimer aucun. Protégez celle des