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démies du royaume, tant pour les arts que pour les lettres ; et, sans compter leurs productions, qu’elles vouloient bien m’envoyer, les seuls programmes de leurs prix étoient intéressans à lire, par les vues saines et profondes qu’annonçoient les questions qu’ils donnoient à résoudre, soit en morale, soit en économie politique, soit dans les arts utiles, secourables et salutaires. Je m’étonnois quelquefois moi-même de la lumineuse étendue de ces questions, qui de tous côtés nous venoient du fond des provinces ; rien, selon moi, ne marquoit mieux la direction, la tendance, les progrès de l’esprit public.

Ainsi, sans cesser d’être amusant et frivole dans sa partie légère, le Mercure ne laissoit pas d’acquérir en utilité de la consistance et du poids. De mon côté, contribuant de mon mieux à le rendre à la fois utile et agréable, j’y glissois souvent de ces contes où j’ai toujours tâché de mêler quelque grain d’une morale intéressante. L’apologie du théâtre, que je fis en examinant la Lettre de Rousseau à d’Alembert sur les spectacles, eut tous les succès que peut avoir la vérité qui combat des sophismes, et la raison qui saisit corps à corps et serre de près l’éloquence.

Mais, comme il ne faut jamais être fier ni oublieux au point d’être méconnoissant, je ne veux pas vous laisser ignorer quelle étoit au besoin l’une