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son petit paquet sous le bras. On lui fait réciter ses vers ; il amuse, il met tous ses soins à se rendre agréable ; et, avec cette superficie d’esprit et ce vernis de poésie qui étoit son unique talent, il réussit au point qu’en l’absence du roi il est admis dans le secret des lettres que s’écrivent les deux amans. Rien n’alloit mieux à la tournure de son esprit et de son style que cette espèce de ministère. Aussi, dès que la nouvelle maîtresse fut installée à la cour, l’un des premiers effets de sa faveur fut-il de lui obtenir une pension de cent louis sur la cassette et un logement aux Tuileries qu’elle fit meubler à ses frais[1]. Je le vis dans ce logement, sous le toit du palais, le plus content des hommes, avec sa pension et son meuble de brocatelle. Comme il étoit bon gentilhomme, sa protectrice lui conseilla de passer du chapitre de Brioude à celui de Lyon[2] ; et, pour celui-ci, elle obtint, en faveur du nouveau chanoine, une décoration nouvelle[3]. En même temps il fut l’amant

  1. Selon M. Masson, Bernis occupa au Louvre, de 1746 à 1751, un logement dont l’emplacement n’est pas déterminé, et reçut, en février 1757, celui du comte d’Argenson.
  2. Il fallait, pour être admis dans ce chapitre, faire la preuve de seize quartiers de noblesse d’épée. La promotion de Bernis est relatée dans la Gazette de France du 19 avril 1748.
  3. Les insignes des comtes de Lyon consistaient en une