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qu’elle l’avoit promise à d’Arboulin (l’un de ses familiers[1]), mais qu’elle l’y feroit renoncer si elle pouvoit l’obtenir pour moi.

Après lui avoir rendu grâce : « Je vais, Madame, vous étonner, lui dis-je ; le bienfait que je vous demande n’est pas ce qui m’occupe et ce qui m’intéresse le plus dans ce moment : c’est la situation du royaume ; c’est le trouble où le plonge cette querelle interminable des parlemens et du clergé, dans laquelle je vois l’autorité royale comme un vaisseau battu par la tempête entre deux écueils, et, dans le conseil, pas un homme capable de le gouverner. » À ce tableau amplifié j’ajoutai celui d’une guerre qui appeloit au dehors, et sur terre et sur mer, toutes les forces de l’État, et qui rendroit si nécessaires au dedans le calme, la concorde, l’union des esprits et le concours des volontés. Après quoi je repris : « Tant que MM. d’Argenson et de Machault ont été en place, on a pu attribuer à leur division et à leur mésintelligence les dissensions intestines dont le royaume est tourmenté, et tous les actes de ri-

  1. Jean-Potentien d’Arboulin, administrateur général des postes de 1759 à 1777, secrétaire du cabinet du roi en 1769, mort le 25 décembre 1784. Il était oncle des deux Bougainville. Les Mémoires de Mme du Hausset et de Dufort de Cheverny renferment quelques particularités sur ce personnage, que Mme de Pompadour appelait familièrement Boubou.