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quis de Castries m’ouvrit son cabinet, où étoient les mémoires du maréchal de Belle-Isle ; le comte de Broglio m’initia dans les mystères de ses négociations, secrètes ; le maréchal de Contades me traça de sa main le plan de sa campagne et le désastre de Minden. J’avois besoin des confidences du maréchal de Richelieu, mais j’étois en disgrâce auprès de lui, comme tous les gens de lettres de l’Académie. Le hasard fit ma paix, et c’est encore une des circonstances où l’occasion, pour me servir, est venue au-devant de moi.

Une amie particulière du maréchal de Richelieu, se trouvant avec moi dans une maison de campagne, me dit qu’il étoit bien étrange qu’un Richelieu et qu’un homme de l’importance de celui-ci essuyât des désagrémens et des dégoûts à l’Académie françoise. « En effet, lui dis-je, Madame, rien de plus étrange ; mais qui en est la cause ? » Elle me nomma d’Alembert, qui avoit pris, disoit-elle, le maréchal en aversion. Je répondis a que l’ennemi du maréchal à l’Académie n’étoit point d’Alembert, mais celui qui cherchoit à l’aigrir contre d’Alembert et contre tous les gens de lettres.

« Savez-vous, Madame, ajoutai-je, quels sont les gens qui animent contre l’Académie celui qui est fait pour y être honoré et chéri ? Ce sont des académiciens qui n’y ont eux-mêmes aucune con-