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relle, il écrivit à l’abbé Barthélemy : « Mon cher abbé, le roi vous a accordé le brevet du Mercure ; mais je viens de voir et d’entendre Marmontel ; il m’a touché, il m’a persuadé de son innocence ; ce n’est pas à vous d’accepter la dépouille d’un innocent ; refusez le Mercure ; je vous en dédommagerai. » Il écrivit à M. de Saint-Florentin : « Vous avez reçu, mon cher confrère, l’ordre du roi pour expédier le brevet du Mercure ; mais j’ai vu Marmontel, et j’ai à vous parler de lui. Ne pressez rien que nous n’ayons causé ensemble. » Il me lut ces billets, les cacheta, les fit partir, et me dit d’aller voir Mme de Pompadour, en me donnant pour elle un billet qu’il ne me lut point, mais qui m’étoit bien favorable, car je fus introduit dès qu’elle y eut jeté les yeux.

Mme de Pompadour étoit incommodée et gardoit le lit. J’approchai ; j’eus d’abord à essuyer les mêmes reproches que m’avoit faits le duc de Choiseul ; et, avec plus de douceur encore, j’y opposai les mêmes réponses. Ensuite : « Voilà donc, lui dis-je, les nouveaux torts qu’on me suppose pour obtenir du roi qu’après onze jours de prison il porte la sévérité jusqu’à prononcer ma ruine ! Si j’avois été libre, j’aurois peut-être enfin, Madame, pénétré jusqu’à vous. J’aurois démenti ces mensonges, et, en vous avouant ma seule et véritable faute, j’aurois trouvé grâce à vos yeux ; mais on