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Mme Geoffrin qu’aucune des bonnes actions de sa vie.

M. de Saint-Florentin me parut touché de mon sort. Il avoit fait pour moi tout ce que sa foiblesse et sa timidité lui avoient permis de faire ; mais ni Mme de Pompadour ni M. de Choiseul ne l’avoient secondé. Sans s’expliquer, il approuva que je les visse l’un et l’autre, et je me rendis à Versailles.

Mme de Pompadour, chez qui je me présentai d’abord, me fit dire par Quesnay que, dans la circonstance présente, elle ne pouvoit pas me voir. Je n’en fus point surpris ; je n’avois aucun droit de prétendre qu’elle se fît pour moi des ennemis puissans.

Le duc de Choiseul me reçut, mais pour m’accabler de reproches. « C’est bien à regret, me dit-il, que je vous revois malheureux ; mais vous avez bien fait tout ce qu’il falloit pour l’être, et vos torts se sont tellement aggravés par votre imprudence que les personnes qui vous vouloient le plus de bien ont été obligées de vous abandonner. — Qu’ai-je donc fait, Monsieur le duc ? qu’ai-je pu faire entre quatre murailles qui m’ait donné un tort de plus que ceux dont je me suis accusé devant vous ? — D’abord, reprit-il, le jour même que vous deviez vous rendre à la Bastille, vous êtes allé à l’Opéra vous vanter, d’un air insultant, que